La flambée des prix des nattes artisanales,au marché de Ruziba, inquiète ménages et artisans. En cause : la raréfaction des matières premières, la pression des cultures vivrières et les effets du changement climatique, qui fragilisent un métier ancestral au cœur des traditions burundaises.
Au marché de Ruziba, connu pour la vente de nattes artisanales, l’activité est intense. Clients, commerçants et artisans vanniers s’y côtoient quotidiennement. Pourtant, derrière cette animation, une préoccupation majeure revient dans les échanges : la hausse notable du prix des nattes, devenues de moins en moins accessibles pour de nombreuses familles.
Rencontré sur place, un client exprime son inquiétude face à cette flambée des prix. « Les nattes sont actuellement chères. Certaines se vendent à 20 000, 25 000, voire même 50 000 francs. Pourtant, auparavant, on pouvait en acheter à 12 000 ou 13 000 francs, et même avec 5 000 francs, il était possible d’en trouver », regrette-t-il. Il rappelle l’importance de cet objet du quotidien : « On dort sur une natte, on s’en sert pour s’asseoir à la maison, surtout pour les enfants. »
Du côté des artisans vanniers, cette hausse des prix s’explique principalement par la raréfaction des matières premières. Le ficus, les feuilles de bananier et le papyrus, indispensables à la fabrication des nattes, se font de plus en plus rares. Selon eux, plusieurs zones où ces plantes poussaient autrefois sont aujourd’hui occupées par des cultures vivrières, notamment la pomme de terre, réduisant considérablement les espaces dédiés à ces ressources naturelles.
À cette pression foncière s’ajoute l’impact des changements climatiques, qui affectent la croissance et la disponibilité des plantes utilisées dans la vannerie. Une situation qui complique davantage le travail des artisans et renchérit le coût de production.
Face à ces difficultés, les artisans et les habitants tirent la sonnette d’alarme. Ils craignent que le métier de la vannerie, pourtant ancestral, ne disparaisse si aucune mesure urgente n’est prise. Ils appellent le gouvernement burundais à soutenir ce secteur, notamment en investissant dans la protection et la promotion des plantes nécessaires à la fabrication des nattes, ainsi que dans la valorisation du savoir-faire artisanal.
La vannerie occupe une place importante dans l’histoire et la culture burundaises, en général, et dans la commune Mugere de la province de Bujumbura en particulier. Autrefois, les nattes fabriquées à partir du ficus, des feuilles de bananier et du papyrus étaient largement disponibles. Aujourd’hui, seules celles en ficus et en papyrus restent courantes, signe d’un appauvrissement progressif de la diversité des matériaux.
Dans les traditions africaines, notamment en milieu rural, la natte est bien plus qu’un simple objet utilitaire. Elle symbolise l’hospitalité, l’accueil chaleureux et le respect envers l’invité. Considérée comme un élément central du foyer, elle sert de mobilier, de tapis de lit et parfois même d’objet décoratif.
Entre héritage culturel et réalités économiques, la vannerie burundaise se trouve aujourd’hui à un tournant. Sans une action concertée pour préserver les ressources naturelles et soutenir les artisans, ce patrimoine risque de s’effriter au fil du temps.

























