La montée en flèche du nombre d’enfants en situation de rue dans différentes villes et centres urbains du pays constitue un réel danger pour l’avenir du pays. A la base de ce phénomène se trouve des facteurs dont la pauvreté ainsi que l’irresponsabilité de certains parents. Toutefois, des opportunités existent pour réduire sensiblement ce phénomène.
Selon les données qui datent de 2011 du ministère ayant les droits de la personne humaine dans ses attributions, les enfants en situation de rue étaient estimés à 5000 mais actuellement selon les chiffres des acteurs qui œuvrent dans la protection de l’enfant au Burundi dont Giriyuja, FVS-AMADE, Terre des Hommes, ces enfants seraient au nombre de 8000 dans tout le pays. « Il est difficile de donner le nombre de ces enfants par le fait qu’ils se déplacent. Ils ont même constitué des réseaux dans des villes, il y a ceux qui passent des vacances en dehors de Bujumbura. Mais aussi signalons que ces enfants peuvent être classés en deux catégories ; ceux qui sont en permanence dans la rue et ceux qui y passent la journée accompagnée de leurs parents ou tuteurs entrain de mendier et fouiller les poubelles et qui rentrent le soir à la maison. » précise l’activiste dans la protection des enfants Christine Ntahe surnommée aussi « Maman Dimanche ». Pour le représentant légal de l’Association Giriyuja Aimable Barandagiye, le phénomène des enfants en situation de rue s’étend également sur d’autres villes comme Gitega, Ngozi, Muyinga et Rumonge avec une nouvelle catégorie d’enfants en situation de rue appelée « enfants pêcheurs » vivant de la pêche dans lac Tanganyika.
Un phénomène nourrit de plusieurs facteurs
La pauvreté à laquelle les ménages sont confrontés constitue un facteur qui pousse les enfants à se retrouver en situation de rue. Il y a d’autres causes comme la démographie galopante, les crises répétitives qu’a connues le pays, la dislocation au niveau des familles, ainsi que le manque de planning, comme l’indique Mylène Ntamatungiro, de l’organisation Terre des Hommes. Madame Ntamatungiro ajoute également que ces enfants sont aussi souvent victimes de la maltraitance. Le représentant du FVS-AMADE Berchmans Niyoyunguruza jette le tort sur le gouvernement qui ne s’implique pas assez et laisse le travail aux organisations.
Une menace potentielle pour l’avenir du pays
« Ces enfants causent l’insécurité en ville car ils volent pour pouvoir survivre et avoir quoi mettre sous la dent, disons que c’est du vol utilitaire. Ils sont aussi un mauvais décor pour la ville vu leur habillement. » Souligne Aimable Barandagiye de l’Association Giriyuja, et d’ajouter que ces enfants ne sont pas nés dans la rue. Christine Ntahe note que voir des enfants grandir dans la rue constitue une perte pour le pays et regrette que ces enfants subissent des abus sexuels et de ce fait ils nourrissent des idées suicidaires, d’où souvent ils tentent de se suicider à mainte reprise. Pour Jean Berchmans Niyoyunguruza de FVS-AMADE « Les enfants en situation de rue ne diffèrent pas des mendiants. Tous les gestes posés envers ces derniers croyant les aider créent une dépendance. La mendicité et l’irresponsabilité des parents sont des facteurs amplificateurs du phénomène. ».
Partant de cet adage burundais « Umwana si uwumwe » madame Christine se demande « où est partie cette culture des burundais ! » Ntahe regrette également « combien certaines familles ont de la nourriture jusqu’à remplir les poubelles mais que lorsque ces enfants toquent à la porte, ils sont chassés et taxés de voyous. Les enfants sont là alors que les églises sont tous le temps rempli de fidèles. »
Prise de conscience collective pour mettre fin au phénomène
« Les enfants en situation de rue sont des enfants talentueux, qui ont un savoir-faire et ils sont capables eux aussi comme tant d’autres », martèle Mylène Ntamatungiro de l’organisation Terre des Hommes. Il faut donc penser à opérer des réformes comme le souligne Aimable Barandagiye, notamment certaines lois comme le code des personnes et de la famille. L’éducation des enfants doit être également assurer par les deux parents.
De son côté, le Directeur de l’Enfant et de la Famille au sein du ministère ayant les droits de la personne humaine dans ses attributions Ignace Ntawembarira précise que le problème des enfants en situation de rue est tellement complexe, et se dit conscient des difficultés qui alimentent le phénomène en rappelant que le ministère travaille sur le problème depuis 2016.Ntawembarira note que l’important est de trouver dans l’urgence un moyen de stabiliser les enfants dans leurs familles et dans les communautés.