A la UneEconomieFrenchhomepage

La stratégie d’exportation des avocats burundais manque de base scientifique solide

Présentés comme une nouvelle culture d’exportation porteuse de croissance, les avocatiers peinent pourtant à faire leurs preuves au Burundi. Selon l’Olucome, le développement de la filière avocat se fait sans études scientifiques solides ni évaluations de rentabilité, au risque de reproduire les échecs observés dans d’autres secteurs clés. Son président, Gabriel Rufyiri, met en garde contre une politique agricole davantage guidée par des intérêts particuliers que par des bénéfices réels pour l’économie nationale.

Alors que le gouvernement burundais mise sur l’agriculture comme l’un des piliers de la Vision 2040–2060 et du Plan national de développement révisé, l’Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques (Olucome) exprime de sérieuses réserves quant à la manière dont ces politiques sont mises en œuvre. Son président, Gabriel Rufyiri, pointe du doigt un manque criant d’études scientifiques et d’évaluations rigoureuses, notamment dans le secteur des avocatiers, présenté comme une culture d’exportation stratégique.

Selon Gabriel Rufyiri, les documents de planification du gouvernement identifient clairement plusieurs secteurs prioritaires, dont l’agriculture, avec un accent particulier sur les cultures de base comme le maïs. Si la vision globale peut sembler pertinente, elle reste, à ses yeux, incomplète. « Certains éléments essentiels font défaut, notamment les études de base et les évaluations permettant de vérifier si le gouvernement est réellement sur la bonne voie », souligne-t-il.

Les avocatiers dans une logique de projets répétitifs

Le président de l’Olucome rappelle que le programme de promotion des avocatiers s’inscrit dans une logique plus large de projets et programmes lancés depuis plusieurs années par les autorités. Il cite, entre autres, le secteur minier, le café, ou encore le charroi de l’État, autant de domaines présentés comme porteurs de croissance. Toutefois, il déplore que ces initiatives ne reposent pas suffisamment sur la science et la recherche.

« Quand on parle de science, il s’agit d’expertises fondées sur des études préalables », insiste Gabriel Rufyiri. Or, selon lui, cette approche fait défaut dans plusieurs secteurs clés. « Il suffit d’observer le secteur du café ou le secteur minier : la situation est similaire à celle des avocatiers », affirme-t-il.

Concernant précisément la filière avocat, le président de l’Olucome rappelle que le processus de production — allant des pépinières au greffage, puis à la récolte — existe depuis 2006. Malgré cette ancienneté, aucune évaluation sérieuse ne semble avoir été menée pour mesurer l’impact réel de ces programmes. « Lorsqu’on parle de ce programme, il faut regarder les résultats et se demander quelles études ont été réalisées pour savoir s’il a réussi ou non », martèle-t-il.

Pour l’Olucome, le constat est clair : le gouvernement continue de lancer des projets et programmes sans base scientifique solide. L’organisation recommande ainsi aux autorités de placer la recherche au cœur des politiques publiques et de recourir à des experts pour concevoir et exécuter ces initiatives. « Ce qui n’est malheureusement pas le cas actuellement », regrette Gabriel Rufyiri.

Des intérêts individuels au détriment de l’intérêt général

Il va plus loin en dénonçant ce qu’il qualifie de primauté des intérêts individuels au détriment de l’intérêt général. Selon lui, plus de cinq ou six programmes gouvernementaux n’ont pas atteint leurs objectifs, faute d’évaluations et de corrections appropriées. « Au lieu d’évaluer, le gouvernement continue à tâtonner », déclare-t-il.

Enfin, Gabriel Rufyiri s’interroge sur les bénéfices réels des exportations burundaises. « Les avocats sont exportés, le café est exporté, les minerais aussi. Mais est-ce que le Burundi, dans son ensemble, en tire réellement profit ? Moi, je dis non », affirme-t-il. Il appuie son argument sur l’existence de deux marchés de change — officiel et parallèle — qu’il juge anormale et révélatrice des dysfonctionnements économiques persistants.

Pour l’Olucome, sans études sérieuses, sans évaluations transparentes et sans bénéfices tangibles pour la population, les ambitions affichées dans les documents de planification risquent de rester des promesses non tenues.

 

Journaliste reporteur , fact-checker, créateur de contenus, responsable des réseaux sociaux à la Radio Indundi Culture, et contributeur wikimedien

What's your reaction?

Related Posts

WP Radio
WP Radio
OFFLINE LIVE