Sur les rives du lac Tanganyika, la pêche devient souvent l’unique alternative pour des enfants contraints d’abandonner l’école. Entre pauvreté persistante, fournitures scolaires hors de prix et familles fragilisées par la montée des eaux, l’accès à l’éducation reste un défi majeur.
Sur la plage de pêche de Nyamugari, dans la commune Mugere de la province de Bujumbura, Franck, 18 ans, est assis sous un arbre, téléphone Android à la main, en pleine discussion sur Facebook avec un ami. Ce jeune homme a quitté l’école il y a trois ans. Élève à l’école fondamentale de Rubura, il a dû abandonner non pas par manque de volonté, mais parce que ses parents n’avaient plus les moyens de financer sa scolarité. Aujourd’hui, il vit de la pêche.
« On peut décider d’aller chercher de l’argent à cause des conditions de vie des ménages. Certains abandonnent l’école, d’autres résistent et continuent à étudier. Tout dépend de la situation familiale. Moi, j’ai commencé à pêcher dès mon enfance », confie Franck.
Des enfants pêcheurs pendant les vacances
Dans cette zone proche du lac Tanganyika, la pêche attire non seulement ceux qui ont abandonné l’école, mais aussi des élèves qui viennent y travailler pendant les vacances scolaires pour se préparer à la rentrée.
C’est le cas d’Arcade Nsengiyumva, élève à l’école fondamentale de Rubura. Allongé sous une tente avec d’autres pêcheurs, il attend la tombée de la nuit pour repartir sur les eaux.
« Je suis encore jeune pour abandonner l’école. Mais parfois, les conditions de vie difficiles poussent certains enfants à décrocher. Moi, je pêche pour acheter mes fournitures scolaires », explique-t-il.
Des parents impuissants face aux coûts scolaires
Plusieurs parents présents sur la plage confirment que la pauvreté est la première cause de l’abandon scolaire.
« Ils abandonnent faute de moyens pour acheter des cahiers ou payer le minerval. Que l’État intervienne », lance un père de famille.
À l’approche de la rentrée scolaire, l’inquiétude grandit. Un autre parent confie que certains de ses enfants risquent de rester à la maison cette année encore.
« Les prix des fournitures ont augmenté. Un cahier de 100 feuilles coûte 3 000 francs. Avec le commerce de ndagala qui ne marche pas bien, je ne sais pas si tous mes enfants retourneront à l’école », dit-il avec amertume.
La précarité aggravée par les déplacements
Les difficultés des familles riveraines se sont accentuées ces dernières années avec la montée des eaux du lac Tanganyika, qui a provoqué le déplacement de plusieurs ménages. Fragilisés, beaucoup peinent à assurer la scolarisation de leurs enfants.
Pourtant, malgré ces défis, les statistiques officielles montrent qu’en 2020-2021, la province de Bujumbura affichait un taux d’abandon scolaire relativement faible par rapport aux autres provinces, estimé à 3,72 %.