Dans son discours à la nation, prononcé à la veille du 62ème anniversaire de l’indépendance, le 30 juin 2024, le chef de l’État a affirmé qu’il n’y a plus de chômage chez les jeunes au Burundi, à l’exception des « fainéants » qui refusent de travailler ou qui souhaitent vivre du labeur d’autrui.
« Franchement, quand tu regardes la jeunesse d’aujourd’hui, tu ne vois pas de désespoir dans leurs yeux, sauf chez les paresseux. Malheureusement, certains Burundais n’ont pas encore compris les opportunités qui s’offrent à eux. Au lieu de travailler dur, ils envient les richesses des autres pays. Il est grand temps que ceux qui se plaignent de la pauvreté du pays se ressaisissent. Il existe encore des Burundais qui veulent vivre aux dépens des autres, attendant de récolter ce qu’ils n’ont pas semé. »
Le Chômage au Burundi : réalité ou illusion ?
Selon le Bureau International du Travail (BIT), une personne en âge de travailler est considérée en situation de chômage si elle est sans emploi, disponible et à la recherche active d’un travail. Au Burundi, l’Office Burundais de l’Emploi et de la Main d’œuvre (OBEM) identifie plusieurs causes de chômage. En premier lieu, la croissance démographique rapide entraîne une forte demande d’emplois. Par ailleurs, bien que le nombre d’écoles et d’institutions universitaires ait considérablement augmenté, les opportunités sur le marché du travail n’ont pas suivi la même évolution, créant ainsi un déséquilibre entre l’offre et la demande.
Le secteur agricole : Une solution suffisante ?
Le Cadre Stratégique de Croissance et de Lutte contre la Pauvreté (CSLPII) indique que 95 % de la population active travaille dans le secteur agricole, principalement dans une agriculture de subsistance. Cependant, cette dépendance exclusive à l’agriculture ne suffit pas à relever les défis de l’emploi, en particulier pour une jeunesse qui aspire à des opportunités plus diversifiées.
Le désir des jeunes burundais de partir
Le rêve de nombreux jeunes Burundais est de quitter le pays pour chercher une vie meilleure ailleurs. Depuis 2018, les Burundais bénéficient d’une exemption de visa pour la Serbie, une opportunité rapidement saisie par ceux qui cherchent à échapper à la précarité.
Incohérences dans les discours officiels
Lors d’une réunion tenue le 27 juin 2024, le ministre de l’Intérieur, accompagné des ministres de l’Éducation et de l’Agriculture, a décidé de mettre en place un encadrement pour les élèves en vacances afin de freiner l’exode des jeunes vers les pays frontaliers, comme la Tanzanie, où ils espèrent trouver du travail. Cette décision semble contredire le discours présidentiel affirmant que le chômage n’est plus un problème pour la jeunesse burundaise.
Les risques de l’exode des jeunes burundais
Maître Prime Mbarubukeye, président de l’Organisation de Lutte contre la Traite des Êtres Humains (ONLCT « Où est ton frère? »), a souligné les causes profondes de cet exode des jeunes Burundais vers l’étranger : pauvreté, chômage, cherté des produits de première nécessité, et difficultés d’obtention de documents de voyage. Cette ONG plaide pour une simplification des formalités liées à l’obtention de ces documents.
Conclusion
- Il n’existe pas de preuves claires et précises indiquant que le chômage est en baisse au Burundi.
- Le désir des jeunes de quitter le pays contredit le discours optimiste du chef de l’État.
- Les mesures strictes pour empêcher les jeunes de partir reflètent une réalité différente sur le terrain.