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Burundi : les grossesses précoces, une crise silencieuse qui s’aggrave

Face à plus de cent grossesses précoces recensées en 2024 chez des filles de 10 à 14 ans, le ministère de la Santé tire la sonnette d’alarme. Entre divergences religieuses sur la contraception, pressions démographiques et appel à l’éducation sexuelle précoce, les autorités cherchent une réponse commune à une crise inquiétante.

Le ministère de la Santé publique du Burundi alerte sur une situation préoccupante : plus de cent filles âgées de 10 à 14 ans sont tombées enceintes au cours de l’année 2024, selon les données du Programme national de santé reproductive. Sept d’entre elles auraient eu recours à l’avortement, un phénomène qualifié d’inquiétant par les autorités sanitaires.

Lors d’un atelier organisé du 29 au 30 juillet 2025 avec les leaders religieux sur la planification familiale et le dividende démographique, le secrétaire permanent du ministère, Olivier Nijimbere, a dénoncé une dérive inquiétante.
« L’éducation morale et sexuelle des enfants s’effondre. Il est urgent de réagir », a-t-il insisté. Selon lui, de nombreuses jeunes filles achètent déjà la pilule du lendemain, signe d’une activité sexuelle précoce et non protégée, qui entraîne grossesses non désirées, avortements clandestins et propagation d’infections sexuellement transmissibles.

Contraception : les divergences religieuses

Face à cette réalité, le ministère appelle à une mobilisation des leaders spirituels pour renforcer l’éducation des jeunes. Les Églises chrétiennes rejettent toute méthode médicale de contraception, ne reconnaissant que la planification familiale naturelle. « Utiliser ces méthodes constitue un péché », affirme le prêtre catholique Sadith Kenimana. Du côté protestant, la même position est défendue, selon Acher Niyonizigiye. En revanche, la communauté musulmane adopte une approche différente : son porte-parole, Cheikh Karenga Ali, rappelle que l’islam autorise le recours aux méthodes médicales de planification familiale, car elles visent à prévenir une grossesse et non à ôter une vie.

Vers une position commune ?

Pour le Dr Ananie Ndacayisaba, directeur du Programme national de santé reproductive, les responsables religieux devraient adopter une position commune afin d’aider à freiner la croissance démographique, actuellement de 2,7 %.
À l’issue des échanges, les participants ont convenu d’agir chacun selon ses convictions et croyances, mais dans la complémentarité, sans s’accuser mutuellement d’être dans l’erreur.

Le recensement général de la population de 2024 révèle une hausse de quatre millions d’habitants en dix ans. Aujourd’hui, chaque femme burundaise a en moyenne cinq enfants, alors que le gouvernement souhaite ramener ce chiffre à trois d’ici 2040.

Appels à l’action et retour aux valeurs

Les leaders religieux se disent prêts à jouer leur rôle de sensibilisation, tout en appelant à un retour aux valeurs culturelles burundaises. Ils exigent aussi que les auteurs d’abus sexuels sur mineurs soient punis de manière exemplaire.

Pour Rénovâte Irambona, experte en comportement social, la solution passe aussi par la famille : le dialogue entre parents et enfants sur la sexualité doit commencer dès l’âge de cinq ans, avec un contenu adapté à chaque niveau de compréhension.

 

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