Ce 10 octobre est célébrée la journée mondiale contre la peine de mort. La plupart des États africains l’ont abolie ou ne l’appliquent plus depuis longtemps. Retour sur la situation en Afrique et sur les dernières exécutions du continent.
Nous sommes le 9 août 1993. Au Maroc, les sujets de Hassan II n’ont qu’un nom en tête : celui de Mohamed Mustapha Tabit, qui sera fusillé aux lueurs de l’aube après avoir été condamné à mort par la justice marocaine six mois plus tôt. Deux étudiantes avaient déposé plainte auprès du procureur du roi contre ce commissaire principal des renseignements généraux pour violence, viol et séquestration.
Au fil de l’enquête s’étaient révélés des dizaines de viols, dont les détails figuraient sur des cassettes vidéo saisies dans la garçonnière de Mustapha Tabit. Leur visionnage et ses conséquences vont bouleverser la société marocaine, au point que cette dernière exécution reste toujours dans les mémoires. Abolitionniste de fait, le Maroc n’a pas appliqué la peine de mort depuis plus de vingt ans, sans pour autant avoir franchi le pas d’une abolition définitive.
Des chemins vers l’abolition qui s’éternisent
Le royaume chérifien n’est pas le seul à conserver, sans l’utiliser, l’épée de Damoclès de la peine capitale. Au Niger, aucun condamné n’a été passé par les armes depuis le 21 avril 1976, lorsque sept personnes avaient été fusillées pour tentative de coup d’État. Depuis, le gouvernement a bien tenté de franchir le pas, mais l’initiative d’ancrer l’abolition de fait dans le droit n’a pas passé l’obstacle de l’Assemblée.
Au Burkina Faso encore, la transition vers une abolition de jure s’éternise. C’est en décembre 1988 que sept militaires ont été fusillés après avoir été condamnés à mort la veille par le tribunal révolutionnaire pour avoir tué un officier de l’armée et sa femme. Même chose en RD Congo, quinze personnes ont été secrètement passées par les armes en janvier 2003, selon Amnesty International.
Une dernière étape à franchir
L’exemple du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, du Bénin ou encore du Gabon n’a globalement pas encore été suivi. Les Béninois ont aboli de jure la peine de mort en 2012, alors que la dernière exécution – deux condamnés pour meurtre rituel -, datait du 23 septembre 1987. Au Gabon, un officier avait été exécuté en août 1985 pour complot visant à renverser le gouvernement et le pays votera l’abolition en 2010.
En 2015, Amnesty International notait : « l’année a été marquée par un certain nombre d’évolutions positives en matière de peine de mort en Afrique subsaharienne. » La Guinée a notamment adopté en juillet un nouveau code pénal qui ne prévoit pas la peine de mort. Reste désormais, pour bon nombre d’abolitionnistes de fait, à faire juste un pas de plus.
JeuneAfrique